
C’est une journée type de l’hiver, quand le mercure ne dépasse pas les 0 °C et que les routes et les chemins d’entraînement sont en partie gelés. Chris, un marathonien habitué des chronos en moins de 2 h 20’ prépare le marathon de Boston en avril prochain. Il aimerait bien faire une séance au seuil, à l’extérieur, mais, vu la météo, il va se résoudre à la faire en indoor, sur un tapis de course à pied. « Cette séance était dans mon planning, je me devais la faire absolument » explique ce professeur de sport de 30 ans.
Pour de nombreux coureurs, les séances sur tapis sont un excellent moyen de poursuivre l’entraînement sans faire de coupure. Comme les cyclistes qui pratiquent le home-trainer, les coureurs à pied s’entraînent sur tapis. « Courir sur tapis est un bon moyen de ne pas avoir à se soucier de l’obscurité pendant les jours d’hiver, sans parler du plaisir de pouvoir continuer à courir en short, témoigne Michel Port, coach sportif et gérant d’une salle de remise en forme à Strasbourg. Un coureur peut tout à fait maintenir et améliorer sa condition physique en faisant ce type de séances à l’intérieur » poursuit-il.
Idéal pour rester en forme mais gare à l’ennui qui vous guette !
Le tapis d’entraînement est donc un excellent outil pour rester en forme, mais hélas, aussi souvent pour s’ennuyer… Regarder la télévision ou écouter son iPod peut malgré tout faire passer le temps plus vite. De plus, comme Chris l’a rapidement découvert, les boutons de certaines consoles de tapis haut de gamme sont souvent très ludiques. Après une heure et demie de jogging engourdissant, toujours au même rythme, vous découvrirez vous aussi le plaisir de jouer avec l’inclinaison et la vitesse du tapis.
« Le changement de l’élévation ainsi que les variations d’allure sur le tapis rompent facilement la monotonie, explique-t-il. Je compare cela à une course en forêt : tout comme passer les cailloux et les branches, la vitesse et l’inclinaison diversifient et renforcent le travail physique. » Même si vous ne préparez pas un objectif ce printemps, les séances sur tapis, avec des changements d’allure et des montées, peuvent vous permettre de vous affûter, sans vous rendre « chèvre » pour autant (lire plus loin notre encadré Lutter contre l’ennui). « Ces exercices sont excellents et servent à tous les coureurs, explique Michel Port. Ils peuvent vous apporter beaucoup, améliorer votre foulée, gagner en force, mais il faut aussi apprendre à bien courir sur un tapis. »
Guide de l’utilisateur : ne pas subir le rythme sous peine de blessure…
Tout au long de l’hiver, Chris prévoit de faire des séances longues et courtes sur tapis et quand même quelques petits footings à l’extérieur « Le tapis ne remplacera jamais les obstacles naturels que l’on peut rencontrer en courant à l’extérieur et, à force de trop en faire, cela peut perturber la coordination et l’agilité. » Et puis, à l’intérieur, logique, il n’y a pas de vent. Ce n’est pas bien grave si vous courez juste pour vous maintenir en forme, mais si vous vous entraînez pour progresser, à une allure spécifique par exemple, augmenter l’inclinaison de la pente de quelques degrés (en pourcentage) vous permettra de vous rapprocher des conditions extérieures réelles.
Les coureurs n’ayant pas fait de séances sur tapis depuis un certain temps doivent recommencer progressivement pour s’y adapter. Chris a appris « à la dure », en commettant l’erreur de faire des séances de près de trois heures à un rythme soutenu, lors de ses deux premiers entraînements en salle. « J’avais des courbatures horribles aux ischio-jambiers, des jours entiers après mon premier entraînement et, après quelques séances, j’avais également des douleurs au-dessus du genou que je n’avais jamais eues en courant à l’extérieur. » C’est un exemple typique du « trop tôt, trop vite » ! « Passer de l’entraînement en extérieur à des séances sur tapis est perturbant. On court, mais sans avancer. C’est très différent » ajoute Michel Port. Il n’y a pas plus de risques de se blesser sur tapis qu’en extérieur, « mais la vitesse du tapis doit être adaptée à sa vitesse de course naturelle ». Il ne faut pas aller trop vite ou trop lentement.
« En aucun cas, il ne faut avoir à supporter la vitesse du tapis, car le coureur doit maîtriser le tapis et non subir sa vitesse. »
Quand les blessures surviennent, c’est en général que le coureur à pied ne sait pas courir sur un tapis : « Il ne faut pas être enfermé dans le rythme du tapis, mais se concentrer sur son centre de gravité pour limiter les impacts et adopter le plus possible une foulée rasante. C’est à la fois plus ludique et cela permet aussi de courir à l’économie » ajoute Michel. Courir à grandes enjambées, en sautant bien haut, génère aussi plus de pression sur les articulations et oblige les muscles à travailler plus dur, sans que la séance soit plus efficace pour autant. « Si vous remarquez que vous attaquez plus fortement avec le talon, vous allez probablement trop vite sur le tapis » analyse Michel.
Pour corriger cela, réduisez la vitesse ou modifiez votre foulée en vous abaissant pour éviter de bondir. « Fixez une ligne horizontale et faites en sorte qu’elle bouge le moins possible. Fléchissez-vous légèrement et vous allez constater que votre foulée va s’accélérer naturellement. Quand l’impact du pied sur le tapis est bruyant, c’est généralement que la position de course est mauvaise. » À la fin de l’hiver, Chris aura engrangé les bénéfices de l’entraînement sur tapis. « Je n’aurai pas subi les conditions climatiques » explique-t-il. Ni le rythme du tapis donc. Lutter contre l’ennui vous rend aussi plus fort mentalement. « Dans mon esprit, Boston m’apparaît maintenant plus facile à courir que certaines de ces satanées séances sur tapis ! »
Lutter contre l’ennui
Les séances d’entraînement dures, comme les côtes, le fractionné et les entraînements au seuil, font oublier l’ennui des séances sur tapis et vous permettent de garder une forme olympique. Faites 10 minutes d’échauffement et de retour au calme après chaque séance.
Pyramide au seuil
Après vous être échauffé, accélérez le rythme de 10 s toutes les 5 min. Après la troisième fraction, vous serez à votre allure au seuil (votre allure sur 10 km). Par exemple, si votre allure est de 5 min au kilomètre (50 min pour un 10 k), faites les cinq premières minutes à 5 min 30 s, puis 5 min 20 s et, enfin, 5 min. Inversez ensuite.
Vite, encore plus vite
Alternez entre 3 min au seuil et 3 min à votre allure du 5 km. Faites de 3 à 5 fractions.
Collines idéales
Visualisez vos séances vallonnées préférées (réelles ou imaginaires) et recréez-les. Utilisez différentes inclinaisons (2 %, 10 %…), différents intervalles de temps (30 s, 2 min) et maintenez votre allure au seuil, au minimum 10 s. Récupérez sur du plat à un rythme plus lent. Essayez ceci :
2 côtes de 90 s à 3 % avec 3 min de récupération,
2 côtes de 60 s à 5 % avec 2 min de récupération,
2 côtes de 30 s à 7 % avec 60 s de récupération.