
Pour bien comprendre le concept de posture, vous devez imaginer votre corps séparé verticalement en deux parties, le côté droit et le côté gauche. Lorsque nous courons sur le plat, nous sommes censés reproduire spontanément des mouvements et une gestuelle parfaitement symétriques des deux côtés. « Mais dans les faits, ce n’est presque jamais le cas », explique Frédéric Brigaud, ostéopathe et spécialiste en biomécanique, auteur de plusieurs ouvrages sur la posture et la foulée en course à pied. « Le balancement des bras, le pivotement du tronc, le temps de contact au sol entre le pied droit et le pied gauche sont rarement équivalents », ajoute-t-il. Et à la longue, tous ces déséquilibres inconscients mais réguliers peuvent être sources de blessure. La somme de toutes ces postures (épaule plus haute, tronc plus ou moins incliné ou tête penchée), pas toujours idéales pour le corps, peut également influer sur les pressions au sein des différentes articulations, la symétrie des appuis et les tensions entre les différents muscles. Tous ces éléments sont souvent occultés, alors qu’ils impactent pourtant l’organisme et le rendement du coureur : « Ils jouent un rôle prédominant dans l’efficacité du geste et dans la recherche de la meilleure posture possible. »
ANALYSEZ VOTRE POSTURE
Vous avez probablement remarqué que dès que nous évoquons la posture, nous avons tendance à nous relever spontanément, ce qui laisse deviner que nous n’étions pas très droits au départ. Ce phénomène démontre qu’il existe une importante différence entre être réellement droit et faire l’effort de se réaligner. « La posture et la gestuelle automatisée sont deux éléments intimement liés et résultent de notre passé traumatique et sportif, complète Frédéric. Tous ces gestes répétitifs du quotidien modèlent progressivement notre corps au fur et à mesure des années ». Pour résumer, notre corps ne serait finalement que le résultat de ce qu’on lui fait subir, et rien ne nous garantit que notre posture habituelle est forcément la plus optimale. Finalement, une posture dite « naturelle » n’est bien souvent qu’une vue subjective et n’est pas une référence fiable.
TESTEZ-VOUS
Pour mieux comprendre l’impact d’un défaut de posture en course à pied, faites un test tout simple. En maintenant votre tronc incliné du côté droit, essayez de courir en cercle dans un rayon de 10 m, d’abord dans le sens des aiguilles d’une montre puis dans l’autre sens : « Vous allez vite remarquer qu’il est nécessaire de produire davantage d’effort dans un sens plutôt que dans l’autre. » Ce petit exercice durant lequel on change brutalement de posture de course permet de prendre conscience de l’importance de la posture sur l’efficacité du geste technique, et donc sur le coût énergétique supplémentaire induit par une gestuelle inadaptée. Tous ces petits désagréments que nous percevons plus d’un côté que de l’autre ne sont en fait que les conséquences pratiques de tous nos défauts et de nos différents déficits posturaux. Ceux-ci s’exacerbent encore plus avec la fatigue durant l’effort. Il faut bien garder en mémoire que le moindre défaut ou déficit aura forcément un impact plus ou moins grand sur l’efficacité de la gestuelle. Malheureusement, nous en avons rarement conscience.
CORRIGEZ VOTRE POSTURE
Rassurez-vous, des solutions existent, et corriger le tir est relativement facile. Il suffit d’arriver à prendre conscience de la posture que nous avons développée au fil des années en course à pied. Cette posture qui nous paraît aujourd’hui si naturelle, mais qui n’est en fait que la conséquence de notre passé et de nos (mauvaises) habitudes. Pour cela, rien de plus simple, il vous suffit d’utiliser votre smartphone. Commencez par vous filmer en courant de face (en posant l’appareil face à vous), puis de profil. Une fois l’enregistrement terminé, posez-vous et regardez-vous tranquillement en train de courir. Le résultat est largement modifiable, à condition bien sûr de connaître la posture la plus efficace à acquérir. Ce travail peut être entrepris avec un spécialiste, mais beaucoup de modifications et d’améliorations peuvent être comprises et mises en place tout seul (voir encadré).
AGISSEZ ET MAÎTRISEZ
« Il ne s’agit pas de changer radicalement sa posture, mais plutôt de la faire évoluer pour tendre vers plus d’efficacité, souligne l’auteur de cette nouvelle méthode. Le plus efficace est de commencer par les pieds, car leur maintien n’est souvent confié qu’à de simples chaussures dites correctrices ou stabilisatrices. » Mais pourtant nous pourrions tous reprendre très facilement le contrôle de nos pieds. « Un déficit de posture ou de maintien au niveau du pied, se traduisant le plus souvent par un effondrement de celui-ci vers l’intérieur (pied pronateur), n’est pas plus complexe à résoudre que le défaut de posture courant de l’enfant qui se tient le dos voûté. » Et pour corriger un pied pronateur, en dehors de toute pathologie, la semelle orthopédique n’est pas indispensable, bien au contraire. Un simple travail pieds nus associé à une prise d’appui avant-pied donne les moyens de corriger rapidement ce déficit postural et de développer ainsi des appuis dynamiques, et par conséquent une foulée plus active. Tout simplement car la technologie n’est pas dans la chaussure, mais bien en chacun d’entre nous. Vous l’avez compris, avoir des pieds pronateurs ou supinateurs n’est pas un handicap irréversible, il s’agit plutôt d’un défaut postural que l’on peut tout à fait corriger. Une simple question de contrôle, on vous le disait.