
Les coureurs ont souvent une relation ambiguë avec la sortie longue, un mélange d’attirance et d’appréhension. Évidemment, le sentiment du devoir accompli une fois rentré chez soi après 2h de course (ou plus) renforce la motivation. Mais parfois, il faut un peu serrer les dents au moment d’enfiler ses runnings un dimanche gris d’automne.
Pourtant, il faut bien la faire, « la sortie longue est la clé de voûte d’une préparation marathon », pour Benjamin Malaty, qui a représenté la France au marathon des championnats du monde d’athlétisme à Moscou l’été dernier, c’est une évidence: « la sortie longue développe l’endurance, et vous apprend à résister à la fatigue musculaire, deux éléments fondamentaux pour le coureur de fond ».
Pratiquement, l’augmentation progressive de la distance parcourue et du temps de course induisent des changement métaboliques importants « une augmentation des fibres musculaires lentes (fibres rouges) qui jouent un rôle prédominant dans la filière aérobie. Ce sont les fibres de l’endurance, elles sont fines et développées en courant lentement et suffisamment longtemps ».
Le travail de l’endurance a également pour effet d’augmenter naturellement le nombre de capillaires. Ce sont ces minuscules vaisseaux sanguins qui apportent le carburant, le glycogène aux muscles (un mélange d’oxygène et de nutriments). Progressivement, les muscles apprennent à mieux utiliser le glycogène et à privilégier la filière lipidique, l’organisme utilise plus facilement les graisses comme carburant principal de l’effort. Voilà pourquoi on perd du poids en courant longtemps et très lentement (tout en limitant l’apport nutritionnel). Ces adaptations physiologiques vont vous aider à courir plus longtemps en supportant mieux la fatigue : « la sortie longue est plutôt placée à la fin d’un cycle hebdomadaire pour permettre à l’organisme de s’habituer à supporter un effort long, en jouant sur la fatigue accumulée après une semaine d’entraînement ».
Lors d’une préparation marathon, la sortie longue sert également de répétition générale pour tester l’alimentation et l’équipement. Si la sortie longue n’est pas simple à aborder, elle ne doit pas pour autant se transformer en calvaire, pour cela il existe des moyens pour rendre cet entraînement plus agréable.

S’entraîner en musique
Pour : Une solution pour ne pas se laisser submerger par l’ampleur de l’entraînement, et éviter de rester focalisé sur sa séance. Un peu comme une stratégie de diversion, la musique vous permet de penser à autre chose en vous évadant mentalement. C’est également une façon d’oublier (un peu) la fatigue musculaire, au fil des kilomètres. Des études ont même démontré que la musique réduisait la perception de l’effort et augmentait le temps de course de 10 à 15%.
Contre : La musique peut vous distraire de votre environnement immédiat, dans certains cas cela peut être dangereux, comme de courir sur une route ou sur un parcours accidenté. Vous serez également moins réceptif à vos sensations de course (comme aller trop vite, par exemple). Vous pouvez également devenir accro et ne plus concevoir le running qu’avec des écouteurs dans les oreilles, c’est un peu dommage.
La solution : Les mêmes études scientifiques ont démontré que la musique avec un rythme d’environ 120 BPM (battements par minute) était plus adaptée à un effort long, en endurance, soit environ 75% de votre Fréquence Cardiaque Maximum (FCM). Des musiques aux tempos trop rapides risquent d’être trop violentes pour un exercice censé être le plus régulier possible. Programmer sa PlayList avec les bons morceaux, ou utiliser certaines applications dédiées (PaceDJ, par exemple) peut vous aider. Évitez d’écouter la musique à plein volume, pour ne pas oublier l’environnement immédiat. Certains types d’écouteurs sont spécialement conçus pour toujours percevoir les bruits extérieurs.

Courir à deux
Pour : Courir à plusieurs peut transformer la sortie longue en une matinée de de convivialité. La séance est beaucoup plus ludique, le temps passe bien plus vite et la sortie est aussi plus sure. Autre avantage, courir en groupe vous rend responsable sans la tentation de vouloir écourter l’entraînement. Une autre façon de se motiver, «c’est un moyen supplémentaire pour courir plus longtemps, on s’entre aide l’un, l’autre».
Contre : Ne compter que sur une seule personne pour faire sa sortie longue, c’est prendre le risque de se retrouver finalement tout seul au moment du départ. Difficile de prévoir à l’avance les blessures ou les grasses matinées de dernière minute. Autre problème, suivre un coureur trop rapide par rapport à son niveau risque de vous fatiguer excessivement, dommage pour la suite de la préparation. A l’inverse, être obligé de courir trop lentement pour de pas distancer son partenaire de course, c’est forcément limiter son potentiel.
La solution : Choisissez le bon partenaire en planifiant à l’avance la séance et l’objectif. S’entraîner avec des coureurs plus à l’aise avec la vitesse lors des séances de fractionné, et sortir le dimanche avec un traileur «spécialisé» dans les sorties longues peut être la bonne solution. Si vous ne connaissez pas d’autres coureurs, essayez les forums de course à pied sur Internet pour trouver des partenaires non loin de chez vous. Dans l’absolu, vous n’avez même pas besoin d’un autre coureur, un ami qui vous accompagne en VTT, vos enfants qui vous suivent en vélo peuvent vous aider à terminer plus vite la sortie.
Sortez groupés
Pour : S’inscrire dans un club et s’entraîner en groupe vous donnera l’occasion de rencontrer d’autres coureurs passionnés, vous apportera une plus grande régularité dans l’entraînement, des horaires fixes et une vraie source de motivation, «à plusieurs on est moins tenté de -sécher- la sortie du jour». Au sein d’une grosse structure, vous bénéficiez d’un bon encadrement et des conseils de l’entraîneur. En outre, de petits groupes se forment toujours spontanément en fonction du niveau et des objectifs communs. Une occasion de découvrir de nouveau parcours d’entraînement déjà testés et approuvés.
Contre : Vous serez «enfermé» dans les horaires du groupe, si vous devez manquer une sortie, vous devrez courir seul. «Vous risquez de ne vouloir courir qu’en groupe, en raison de l’émulation ou de la convivialité, ce qui peut poser problème lors de courses en solo. Un coureur aussi savoir se gérer tout seul», selon Benjamin.
La solution : Gardez le meilleur des deux mondes. Faites la sortie longue ou certaines séances de fractionné à plusieurs, mais n’oubliez pas de courir en solo lors d’autres entraînements (seuil, allure marathon). Vous profitez des bénéfices du groupe pendant votre sortie longue, et vous développerez également vos propres stratégies mentales en courant seul.
Divisez la séance
Pour : Fractionner la sortie longue en plusieurs parties peut rendre cet entraînement plus facile à réaliser. Au lieu de vous concentrer sur 25km ou 02h de course, divisez la distance en 5 boucles de 5 km chacune, par exemple. Avec à chaque fois un point ravitaillement, boisson, étirements, repos. Une récupération de 5’ environ ne va pas influer fondamentalement sur l’objectif de la sortie. Repérez des boucles possibles autour de votre domicile vous permettra aussi d’avoir un point de repli en cas de problème (météo, fringale).
Contre : Tournez encore et encore sans jamais changer de paysage et d’environnement risque forcément de devenir un peu ennuyeux au fur-et-à-mesure de la sortie.
La solution : Alternez le sens de chaque boucle, un changement à priori mineur, mais qui peut s’avérer très efficace. Essayez aussi de recruter un ami pour vous accompagner sur une ou plusieurs boucles.