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Contrairement au Kenya ou à l’Éthiopie, le Japon n’a jamais vraiment été considéré comme une nation de coureurs de fond. Pourtant depuis 1991, les marathoniens japonais ont remporté 19 médailles olympiques et mondiales sur marathon. Et en 2015, le Japon a enregistré le plus grand nombre de finishers sur marathon (559 991). Pourtant, s’entraîner à Osaka n’est à priori pas si différent que de fractionner à Paris ou à Berlin. Alors que peut bien nous enseigner l’entraînement à la sauce japonaise ?

CHEMINER POUR TROUVER LA VOIE

Bien qu’il n’y ait pas de méthode d’entraînement spécifiquement japonaise, une des explications de leur réussite résiderait dans le kilométrage. Jusqu’à 300 km par semaine pour les champions, une aberration pour bon nombre d’entraîneurs européens. Lors d’une préparation marathon, la double championne olympique Yuko Arimori se souvient avoir un jour couru 2 séances de 20 km, une le matin et l’autre le soir, puis d’avoir enchaîné avec 50 km dès le lendemain. De longues distances, mais une récupération optimisée allant parfois jusqu’à la promenade en marchant.

Même si peu de coureurs peuvent digérer 1 000 kilomètres de course par mois (eh oui), un tel volume peut permettre de s’habituer à une fatigue musculaire. Pour suivre cette voie du samouraï, il vous faudra donc courir plus et plus longtemps. Avec par exemple des microcycles de quatre semaines basés sur le kilométrage et l’endurance, mais ne tentez surtout pas d’atteindre de tels volumes. En Europe, les entraîneurs misent plutôt sur la science et la diversification pour travailler les allures et limiter les risques de blessures tout en améliorant plus efficacement l’endurance.

LE SENS DU SACRIFICE

Pour préparer ses coureurs à un départ très matinal, lors des championnats du monde en 2007 à Osaka, un entraîneur japonais a demandé à ses coureurs de prendre leur petit-déjeuner tous les jours à 4h du matin, pendant presque un mois. Après tout, rien d’illogique dans tout cela, le mot le plus utilisé au Japon étant doryoku, qui signifie effort (d’après une étude du diffuseur national).

Un exemple parlant : les Japonais sont capables, pour se renforcer et s’aguerrir, de courir des distances incroyables en tournant sur une piste d’athlétisme et en effectuant des centaines de tour. À méditer.

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Si le marathon est populaire, les Japonais apprécient surtout les ekidens, un marathon couru en relais et par équipe de 4 à 6 coureurs. Dans son livre sur la culture de la course japonaise, [amazon_textlink asin=’057130317X’ text=’The Way of the Runner’ template=’ProductLink’ store=’wwwrunnerswor-21′ marketplace=’FR’ link_id=’475baae3-4458-11e7-8ca6-31ec5368bea8′], l’écrivain Adharanand Finn explique que l’ekiden incarne bien le concept de wa, qui concerne l’harmonie du groupe. Un concept japonais ancré dans la culture populaire.

Vous courez pour la communauté, et pas seulement pour vous-même. Et les temps réalisés entre deux relais (10 km par exemple) sont parfois bien meilleurs que les records sur les distances correspondantes. En France, les ekidens sont désormais suffisamment nombreux pour expérimenter le wa. Notre auteur raconte sa rencontre avec Kenji Takao, qui a remporté les Jeux d’Asie en 1998 sur 10 000 mètres en résistant à un coureur du Qatar dans la dernière ligne droite, « j’ai gagné à cause de mon entraînement ekiden », avait alors expliqué Takao, « car avec l’ekiden, vous ne laissez jamais passer personne ».